Conseils de merlin
- L’incertitude que vous sentez en vous est le prélude en la sagesse
- La sagesse est vivante et par conséquent toujours imprévisible
- L’ordre humain est constitué de règle. L’ordre du magicien ignore les règles – il est fluide comme la vie
Récit :
Merlin était souvent captivé par de petites scènes de la nature dont il tirait des leçons. Un jour qu’Arthur et lui marchaient dans la forêt, ils entendirent un geai les invectiver du haut d’un pin voisin.
- Arrête-toi ! Regarde… dit Merlin calmement.
Le geai était nerveux, impatient. Après avoir jasé contre les intrus, il s’envola vers une autre branche pour mieux les apercevoir. Quelques instant plus tard, mécontent, il gagna une troisième branche. Ensuite, semblant avoir oublié leur présence, il se dirigea en sautillant vers une pomme de pin qui l’intriguait. En l’espace de quelques secondes, il s’ébroua dans une petite mare, chassa un roitelet gris et se mit à picorer un morceau d’écorce pourrie.
- Que penses-tu de cette attitude en tant que mode de vie ? demanda Merlin.
- Pas grand-chose, répondit Arthur, il agit comme un ludion sans cervelle qui ne sait pas ce qu’il fera l’instant suivant.
- C’est ce qu’on voit quand une créature vit en se confiant uniquement à dieu, déclara Merlin. Elle passe sa vie à suivre ses impulsions successives, sans penser au futur et, somme toute, elle ne se débrouille pas si mal, n’est-ce pas ?
Comprendre la leçon
(…) Le magicien sait que la vie s’est toujours organisée de l’intérieur. Ces mêmes imperceptibles tendances à la gravité qui ont fait surgir des étoiles dansantes du chaos existent à tous les niveaux de la nature. Une rose peut être totalement certaine qu’elle deviendra une rose, même si sa première pousse ne diffère guère de celle d’un haricot ou d’une violette et, sous forme de graine, ses seules prétentions à la singularité résident peut-être dans d’infimes spirales de ses filaments d’ADN. Nous autres humains, en revanche, sommes très préoccupés de réussir notre vie et nous passons un temps infini à nous démener et à nous battre pour essayer d’affirmer notre singularité.
- Et alors ? dit Arthur, qu’importe si les oiseaux vivent sans penser ou si une rose est toujours une rose. Ils sont dépourvus de pensée et n’ont donc d’autre choix que d’être ce qu’ils sont.
- C’est vrai. Vous autres mortels êtes doués de libre arbitre, mais vous avez une bien trop haute opinion de lui. Je vis sans faire de choix, et cette vie est beaucoup plus heureuse, répondit Merlin.
- Sans faire de choix ? Mais tu prends autant de décisions que moi, objecta Arthur.
Merlin haussa les épaules.
-Tu es dupe des apparences. Regarde ta main. Il est incontestable qu’elle t’appartient, pourtant tu n’interviens pas dans la croissance de ses cellules ; tu ignores comment ses nerfs et ses muscles bougent, tu n’agis pas consciemment pour que tes ongles poussent ou qu’une écorchure cicatrise quand tu t’es blessé, n’est-ce pas ?
- C’est vrai, je ne fais rien de tout ça.
- En d’autres termes, poursuivit Merlin, elles ne se présentent pas comme des choix pour toi. Ces fonctions ont été attribuées à une partie de ton cerveau qui fonctionne automatiquement et échappe donc à ta volonté. De même, toutes les activités auxquelles tu consacres tant de temps – penser, décider, sentir, choisir, juger –, je les ai confiées à la partie automatique de mon cerveau. Ce qui est une autre manière de dire que je les ai remises entre les mains de Dieu.
- Alors à quoi te sert la partie consciente de ton esprit ? demanda Arthur.
- A profiter du monde et du miracle de la vie. Je suis le témoin de tout ce qui est et je t’assure qu’il n’existe pas de spectacle plus surprenant, plus beau ni plus satisfaisant.
Vivre avec la leçon
Les hommes sont tellement harcelés par les aléas de la vie moderne que la plupart d’entre nous réagissent en essayant de l’ordonner. (…) L’ego répond au chaos en luttant contre lui et en s’efforçant de le maîtriser encore mieux. (…)
Mais toute cette lutte, ces soucis, cette organisation et cette volonté de contrôle vont à l’encontre de la nature de la vie. La vie est faite de chaos et d’ordre entremêlés. L’un et l’autre sont inséparables. Si vous voulez vous fondre dans le flux de la vie, vous ne pouvez simultanément lui résister. Le chercheur de perfection accepte une part d’incertitude permanente, il (ou elle) se sait voué(e) à un équilibre précaire. « Le bon disciple, disait Merlin, trébuche toujours mais ne tombe jamais. »
Bien que votre ego déteste les aléas de la vie, vous en avez souvent profité. Repensez une seconde aux occasions inattendues qui se sont présentées, aux propositions d’aide que vous n’aviez pas prévues, aux inspirations subites, aux décisions soudaines de partir ou d’aborder un étranger, qui vous ont ouvert de nouveaux horizons. C’est le cours naturel de la vie. « Votre vie est déjà organisée en elle-même, disait Merlin. La vie découle de la vie, le bouton se change en fleur, l’enfant grandit et devient adulte. Ayez confiance en chaque étape, honorez-la et laissez venir la suivante sans effort. » (…)
L’ego doit sonder ses peurs et cesser d’essayer de tout contrôler. C’est un aspect très important de votre quête. Si vous pouvez accepter la force débordante de la vie et si vous la laissez vous emporter, vous accepterez la réalité. L’acceptation du réel est le préalable à une vie paisible et heureuse. L’alternative se réduit à une bagarre interminable, parce qu’elle est une lutte avec l’irréel, avec un mirage de la vie et non la vie elle-même.
(Dr Deepak Chopra)